Pour NICOLAS UNTERSTELLER

Ce n'est pas sans émotion que j'évoque ici le souvenir de Nicolas Untersteller. Il fut mon professeur, un de mes tous premiers maîtres, et m'aida considérablement dans ma vie, ma carrière de peintre.

Né à Stiring-Wendel, il fut une personnalité exceptionnelle, un grand Lorrain.

Prix de Rome en 1928, il reviendra ensuite à Metz. Très attiré et doué pour l'art mural, grand connaisseur de l’oeuvre de Piero Della Francesca dont il aura su retenir la leçon de belle fluidité, de construction rigoureuse( que le grand Italien devait aussi au Nord, à Juste de Gand en particulier), il exécutera alors d'importantes commandes pour l'Etat.

A cette époque, Nicolas Untersteller crée un atelier de peinture à Metz. Peu de gens  alors se souciaient d'art dans cette ville; il n'y avait pas de galeries, pas d'expositions. Il n'y avait que Nicolas. Et cet atelier était très vivant.

Je me souviens qu'un jour, alors que je débutais ( je gagnais ma vie comme peintre en bâtiment, mes loisirs étant consacrés à l'étude des Maîtres; à la bibliothèque, je copiais Holbein, Dürer...), installé au bord de la Moselle afin de tenter quelque esquisse, survint Nicolas. Après avoir observé mon travail, il se rendit à l'évidence qu'il me manquait des bases. Peu après, le conservateur du musée de Metz, Roger Clément, que je connaissais, lui suggéra de m'accueillir dans son cours. Ce que fît Nicolas gracieusement. Que sa mémoire en soit ici remerciée.

Dans ce cours, travaillait à ma droite un monsieur charmant: le gouverneur de la ville de Metz, le général de Sainte-Croix, qui dessinait là pour son bon plaisir. Ensemble, nous parlions beaucoup de peinture...

Le service militaire menaçait. Un jour, je dis à ce général: "Vous le savez, Metz est une ville abritant 28 régiments; ça me semble beaucoup. Ah! aller à Paris, si c'était possible!"

Le Gouverneur accéda à mon désir et je fus affecté au 24 e Régiment d'Infanterie aux Invalides, tout près de Montparnasse, là où se trouvaient les académies.

Mais peu après avoir commencé à les fréquenter, la guerre est arrivée. Et je fus mobilisé, comme tant d'autres...

Après bien des péripéties, je me retrouvais à Paris. Nicolas Untersteller avait été nommé professeur de Fresque aux Beaux-Arts. Je vivais alors dans la clandestinité, sous un faux nom. Un jour, je rencontre Nicolas rue Bonaparte- je gagnais toujours ma vie comme peintre en bâtiment-, il me dit: "Tu es doué, pourquoi ne te présentes-tu pas au concours de l'Ecole?"

Ce que je fis. L'examen n'était pas si simple pour un homme jeune, ayant dû travailler très tôt pour vivre et jeté brutalement dans la guerre.

Cependant je réussis et devins élève aux Beaux-Arts de Paris.

Nicolas Untersteller, après avoir été chef d'Atelier, sera nommé directeur de l'Ecole. Cette fonction qu'il exercera efficacement lui permettra d'ouvrir à de jeunes et grands talents certains postes de responsabilité: Legueult, Brianchon et d'autres devinrent chefs d'Atelier; de grands artistes comme Jacques Villon participèrent aux jurys. Un souffle nouveau passa sur l'Ecole...

Tant de devoirs si bien assumés imposent. De la Villa Médicis, des fresques de Saint-Pierre-de-Chaillot, à la plus haute charge de l'enseignement des Beaux-Arts, Nicolas Untersteller aura parcouru un beau chemin. La ville de Stiring-Wendel peut le saluer!

HILAIRE

oct. 2000